samedi 20 août 2016

Les anges aux figures sales

Voyez bon peuple de France comme la misère et le malheur sont proches de chez vous, voyez comme ces pauvres ombres plongent dans le puits sans fond du désespoir, acculés à un semblant de survie aussi pathétique que funeste.
Et réjouissez vous d'en être soustraits.
C'est à peu de choses près les réactions qui s'en sont suivies sur les ondes au lendemain de la diffusion du reportage sur les habitants du quartier de Saint Leu à Amiens. Pauvres de Saint Leu, malheureux objets d'une injuste indifférence que la misère a propulsé sous les feux de la rampe pour mieux effrayer la classe qui se dit moyenne. Et en effet elle l'est moyenne, dans son indignité à savoir si l'on doit ou pas plonger les yeux dans le miroir de la laide vérité. Dans son indécence à s'interroger pour savoir si ces salauds de pauvres font bien tout ce qu'il faut pour s'en sortir et ressembler enfin à de dignes contribuables. Et pourtant, à un coeur compatissant fallait il plus que les jolies yeux rougis de larmes de la jeune Cindy et pourtant si pleins de courage pour s'émouvoir ? fallait il davantage que le sourire de Monique sans le sou mais accueillant à sa table comme elle disait "des tchios bien malheureux..." pour trouver à ces gens toute la dignité que beaucoup ont bafouée par leurs critiques stériles. L'enfer qu'on leur prête comme vie pouvait allègrement se passer du purgatoire des jugements dont ils ont fait l'objet. Et si à la faveur d'une saine colère on cherche un coupable, c'est bien dans la liste des évadés fiscaux qu'il faut le chercher et pas dans ces maisons délabrées dont ils sont parfois expulsés pour trois cents euros de loyer impayé. Notre société finira-t-elle comme monsieur Gray,  refusant de voir le sordide portrait qui est pourtant le prix de son artificielle beauté ?

 courage frères du Nord. Le troisième livre de Dante c'est le paradis, ... celui où tout les anges ont des figures propres.

jeudi 3 mars 2016

Les témoins

Voici bien longtemps que les deux témoins observaient la danse frénétique des âmes dont ils avaient la charge. Ils avaient au début beaucoup échangé sur les destinées singulières de leur ayant garde, mais le temps faisant, les mots avaient laissé place à des échanges de regards seuls véhicules dignes de la profondeur de leur sentiment.
A mesure des vies accompagnées, le questionnement sur le choix des hommes à leur détriment était resté sans réponse. Eux que le créateur avait choisi à tout autre, usaient du don le plus précieux de la création sans le moindre discernement. Comment les élus du Tout Savant, pouvaient ils se conduire ainsi.
Avaient ils déjà oublié ce qui les avaient conduit hors du jardin de la félicité ?
Et pourtant malgré leurs outrances sans limites ils demeuraient les écrins du précieux dépôt. Chacune de leurs actions était librement consentie, ils n'étaient contraint à rien mais invités à tout.
Il arrivait pourtant en dépit de leur nature, que l'un deux inspiré par l'insondable, s'élève plus haut que ses pareils et se met à réaliser la mission qu'il leur fut confiée. Alors la création entière faisait silence pour observer l'homme dans ce qu'il a d'unique. C'était celui ci face à la foule gavé de haine qui avait dit "que celui qui n'a jamais péché lui jette la première pierre". C'était cet autre qui chassé par les siens avait dit "seigneur pardonne à mon peuple ils ne savent pas ce qu'ils font." c'est dans ces moments, que les témoins comprenaient pourquoi l'homme fut choisi. Inspiré par la grandeur du vivant, les fils d'Adam avançaient vers une destinée que même le ciel et les montagnes avaient déclinée. Le regard chargé, les témoins réalisaient alors combien savant était le créateur et pourquoi jadis leur genoux avait touché le sol.


dimanche 14 février 2016

Quand j'habite au 34 avenue des Sycomores

Quand les boulevards pluvieux de ma vie m'égarent au sein de mon âme, je cherche alors le chemin qui mène à l'avenue des Sycomores. A mesure que je remonte cette avenue la pluie se calme et le soleil se fraie un passage discret entre les branches des allées d'arbres.
Devant chaque maison, il y a une pelouse où les enfants ont laissé leur vélo et leur trottinette.
Je pousse le pas et arrive devant le numéro 34. Sans m'être complètement inconnue, cette maison n'est jamais tout à fait la même. La grosse porte marron est entre ouverte et je la pousse. J'arrive dans un corridor au sol carrelé de blanc et d'orangé. Sur la gauche il y a un grand escalier de bois vernis, je m'y attarde un instant et le touche en fermant les yeux. Alors me reviennent du fond de ma mémoire, des souvenirs de jeux et de rires. De la cuisine qui est en face, une odeur de pain qui cuit me replonge dans un amour et un bien-être qui m’enivrent presque quand soudain une femme apparaît. Elle a les bras chargés d'un plat et me regarde en souriant. Elle porte une robe de coton bleu et ses cheveux sont remontés de part et d'autre d'une barrette de bois, je sais que c'est ma mère. A chacune de mes visites, son age est celui dont j'ai besoin. Elle a parfois 75 ans et me rassure, elle a parfois 50 ans et me conseil, elle en a parfois 30 et me console. Je tourne la tête vers la droite car elle m'invite à entrer dans la salle à manger. Je la suis et là autour de la table des enfants y sont réunis. je les reconnais ce sont mes frères et mes sœurs qui se régalent du repas en riant. La tête de table est occupée par un homme. Il porte une chemisette de lin beige sur des épaules puissantes et sa chevelure brune brille.
Il reste une chaise libre entre l'un de mes frères et l'une de mes sœurs et je vais pour y prendre place sans quitter l'homme du regard dont j'ignore encore le visage mais que je sais connaitre. C'est mon père. Il pose sur moi un regard d'un amour infini et me sourit. A cet instant précis, tout mal, toute peur m'est étrangère. Il me tire de mon extase en me disant te voilà  tu nous a manqué nous t'attendions et je réponds juste merci moi aussi papa.
Alors moi aussi je prend part au repas et me mets à rire avec mes frères et mes sœurs sous le regard de papa et maman.
C'est ma maison ! Celle où je retourne quand au dehors il fait froid et que j'ai peur.
Alors si toi aussi le gris de la vie te fait parfois frémir, viens m'y rejoindre quand tu en as besoin.
Il reste quantité de maisons libres pour celui qui veut y mettre ceux qui habitent son cœur.
J'y suis arrivé sur les conseils d'un monsieur admirable qui se nomme Capra.
Il m'y a accompagné en me prenant par le bras et m'a présenté nos voisins. Des gens formidables qui eux aussi cherchaient une maison.
Il habitent au numéro 35 se sont les Bailey, Georges et Madeleine Bailey.



vendredi 29 janvier 2016

La singularité

Bien avant le temps et l'espace, elle était présente.
Perdue dans le chaos primordial le créateur la libéra en lui disant soi ! Alors toute chose fut dans l'univers.
En un instant que nulle échelle ne peut mesurer, l'univers entier pris naissance et cette formidable explosion créatrice étendit la matière jusqu'aux confins de l'infini.
La singularité, c'est le nom que les hommes lui ont donné.
Depuis le berceau du monde de minuscules parties de la singularité furent projetées dans l'espace et jusqu'à la fin des temps elles vogueront à la recherche de celui qui les libérera.
C'est cet instant où tout bascule ; où tout devient possible.
Ce moment où à la faveur de ce qui est plus grand que nous, tout change et où l'on se met à vibrer avec l'univers tout entier.
C'est cet appel que l'on doit passer car quelque chose au fond de nous nous dit que ça peut tout changer, C'est cette improbable décision qui nous amènera vers un après dont on ignore tout mais qui doit être ainsi.
Chaque jour les particules voguent autour de nous, elle nous parlent dans la langue universelle, celle qui a existé au commencement.
Alors fermez les yeux et écoutez leurs voix.
C'est par amour que le monde fut créé et c'est dans cette langue que tout est exprimé.
Un regard bienveillant à l'autre et c'est le début de l'explosion qui donnera naissance à un empire.
Porter assistance à un orphelin et voici que le destin d'un rédempteur est scellé.
Alors vos rêves d'enfant ne deviendront jamais les regrets de votre maturité.
Mais ayez aussi à l'esprit que lorsque la poussière de la première étoile qui fut vous aura touché, elle aura juste retrouvée le chemin de ce dont elle faisait partie lors de la fondation du monde.
Ou alors peut être que lorsqu'elle nous touche ce n'est pas elle qui vient à nous mais nous qui retournons un peu chez nous.




jeudi 14 janvier 2016

Le premier matin du monde

Il avait veillé la nuit entière scrutant l'horizon attentif au miracle promis.
Les anciens lui donnaient en arabe le nom de "Khayt el abyad" le fil blanc.
Une infime lueur, le présage visible de l'inéluctable victoire de la lumière sur les ténèbres et c'est quand il faillit sombrer dans la torpeur que le signe se manifesta. Il contempla le pathétique combat de la nuit cherchant refuge dans les entrailles de la terre pour échapper à son tragique destin et au triomphe sublime de la lueur matinale sur le monde.
Il ferma les yeux après ce prodigieux spectacle et les ouvrit sur une aube telle qu'il n'en avait de mémoire jamais vécu.
Il contemplait la majesté de la création et ses yeux qui avaient naguère vu tant de noirceur, observaient à présent chaque chose, chaque créature comme les éléments indissociables d'un tout unique.
Il pouvait en toute chose voir l'éclat d'une miséricorde infinie, le sceau d'une promesse à jamais scellée. Le monde était comme au lendemain de sa création exempt de toute souillure, débarrassé de l'imposture de la civilisation.
Le sage qui l'avait recueilli lui avait enseigné que le salut pour un homme comme lui ne pouvait avoir lieu qu'en renaissant une seconde fois.
Il respira profondément pour emplir ses poumons de cet air nouveau et resta debout jusqu'à la défaite totale de la nuit.
Enveloppé de la lumière divine, il comprit que désormais il assisterait chaque matin au premier jour du reste de sa vie.

dimanche 3 janvier 2016

Merci pour cette année




Je voudrais souhaiter à tous les lecteurs une bonne et heureuse année 2016 et vous livrez quelques un de mes vœux :

Que 2015 garde prisonnier dans les filets du passé vos peines et vos douleurs.
Qu'un avenir meilleur s'écrivent sur les pages vierges du grand livre de la vie pour chaque créature.
Que la bienveillance devienne une nouvelle manière pour chacun d’appréhender autrui. 
Que le prodigieux spectacle de la nature nous encourage a agir pour sa sauvegarde.
Que lettre de la loi ne fasse pas oublier le cœur de la loi.
Que dans nos jugements nous soyons mesurés car cette avec cette mesure que nous serons jugés.
Que nous gardions a l'esprit qu'un repas modeste partagé vaut mieux qu'un festin de roi solitaire.

J'aimerai pour conclure emprunter les mots du regretté Walt Whitman : 

Que le prodigieux spectacle continue et que tu peux y apporter ta rime…